Après 20 ans au pouvoir en Syrie, quel bilan pour Bashar Al-Assad?
La semaine dernière marquait le 20e anniversaire de l’accession au pouvoir de Bashar Al-Assad. Malgré une guerre interminable, la résurgence de dissensions au sein de son clan alaouite et une économique en déshérence, le président syrien reste puissant.
Son père, Hafez Al-Assad, maitre incontesté de la Syrie durant 30 ans, avait initialement choisi son fils aîné, Bassel, pour lui succéder et l’y avait préparé. Mais la mort accidentelle de ce dernier en 1994 le contraignit à rappeler son cadet, Bashar, alors ophtalmologue à Londres. A la mort d’Hafez, le voici propulsé à la tête du pays au milieu d’une certaine euphorie car d’aucuns voient alors en lui un réformateur, celui qui initierait la démocratisation d’un régime brutal et verrouillé.
Du printemps de Damas à la guerre civile
De fait, Bashar commence par libéraliser l’économie ; quelques opposants politiques, en prison depuis des années, retrouvent même la liberté. Cette période, surnommée «le printemps de Damas», sera toutefois de courte durée car la vieille garde du parti Baas veille. L’ouverture démocratique tant attendue n’aura pas lieu tandis que la corruption parcourt allégrement les allées du pouvoir damascène.
En 2011, Bashar Al-Assad se retrouve confronté à une contestation populaire inédite par son ampleur ; stimulés par les événements survenus en Égypte ou en Tunisie, de nombreux Syriens commencent par exiger plus de libertés puis finissent par réclamer la chute du régime. Les manifestations toujours plus nombreuses sont très violemment réprimées ; débute alors une terrible guerre, où s’affronteront forces du régime, groupes rebelles et islamistes. La Syrie devient le théâtre meurtrier d’un conflit aux multiples ramifications et enjeux. Isolé sur la scène internationale, Assad semble vaciller mais l’entrée en scène de deux alliés de poids, la Russie et l’Iran, font peu à peu pencher la balance en sa faveur. Fort de ses soutiens, le régime syrien parvient à reconquérir une grande partie du territoire.
S’il parait avoir aujourd’hui gagné la guerre, Bashar n’a pas remporté la paix pour autant; deux zones lui échappent encore : le nord-est, géré par une administration kurde et la région d’Idlib, aux mains de groupes islamistes. D’autres pans du territoire sont également sujets à des combats sporadiques en raison de la présence résiduelle de jihadistes de l’État islamique.
L’économie syrienne, terrassée par la guerre et désormais privée du bouclier libanais, ne donne quant à elle aucun signe de reprise entre chute de la monnaie, chômage, appauvrissement continu de la population et embargo américain. Il y a plusieurs semaines, à Deraa, siège historique de la contestation de 2011, les manifestations contre les pénuries ont repris.
Des fissures sont aussi apparues dans le camp familial alaouite des Assad. Exemple avec la rébellion du propre cousin de Bashar, Rami Makhlouf, grand argentier du régime, qui réclame à l’État des millions de dollars d’impayés tout en se disant victime d’intimidations des services de sécurité.
Malgré des élections législatives tenues ce dimanche 19 juillet -que son parti est sûr de remporter-, le contexte ne semble guère se prêter aux réjouissances pour Bashar Al-Assad. Plusieurs experts évoquent «un régime aux abois» mais c’est un avis que ne partage pas totalement Fabrice Balanche, maitre de conférences à l’Université Lyon-2, géographe et spécialiste de la Syrie. Les difficultés existent certes, mais le chercheur l’affirme : c’est avec Assad qu’il faudra compter pour l’avenir de la Syrie.